LOU LOUT ET LOU CÒ : Léon Armand

, par Claude Vertut

LOU LOUT ET LOU CO per Léon Armand è la meuna trabucada à la fín.

LOU LOUT ET LOU CO

Ço que_cal may oyma, ocos lo Libertat !
Aquis lo miliouro mestresso.
N’es uno qu’o chomay troumpat.
Que sert lo glorio, lo richesso ?
Que sert d’obé boun bi, boun chas,
È Se nou poudes fa soulomen un pas,
Se nou poudes bira l’esquino
Lèba lou det, combia de mino,
Son que qu’alqù”orpoillan del rey
Soi disan ol noum de lo ley,
Nou bengo oquis moustra so facioë
Ah ! que serio de bouno gracio
On d”un boun boussi de bostou,
De lour coressa lou tourtou !
Que l’on se trotorio, olero !
Mais ocos prou...
Coupe s’en nostro histouèro :

Pel met d’un bos de Corlucet.
Un Lout e’n Co se roncoutrerou ;
Lou Co gras et redoun ; lou Lout pélat et set
Touches dous s’og-ochèrou :
Lou Lout se pensabo tout soul
Qu’on lou Co n’ooûrio soun sodoul ;
Car res qu’o beyre soun esquino
Y obio de qué fa friouta l’bet,
De que ly pensa chour et net ;

Lou Co fosio bouno cousino ;
Chomay nou potissio, doun éro gros et gras
Obio lo panso plo rounflado,
Chosio sus un boun motolas,
N’endurabo pas lo rousado,
Ni may lo plecho ni lou ben :
Quond fouguès estat ol coubén
N’aoûrio pas fat milliouro bido...
Lou Lout l’y fet pîètat,
Ombè soun bentrè tout pélat,
Ond so boμrro mal escorpido.
Cal dire que dins oquel ten
Louys Louts potissîoû plo souben ;
Car lous Cos net et chour beillabou l
Et chomay ne s’en olossabou.
Nostre Co n’ro pas oytal ;
N’ooûrio pas ochut to boun rablè  
S’oches pas souen quittat l’estable !
Mais zo cal dire, obio’n mestre trop coumo cal !
Un mestre coumo n’y’o gayré,
Un paoûre bodoounas, pécayré !
Qu’èro fol de soun cognoutous !
Qμe boules fà ? cadun soun gous !
Nostre Co doun del Lout s’opprocho
Et sourtiguen un croustet de so pocho :
 « Tè, ço l’y fèt, m’as plo l’ayr’ogonit.
Chuco m’ocos ; quand Pooûras escorpit,
 « Te porloray. » Lou Lout né fet qu’uno boucado
Tont obio lo panso liourado.
 Aros, so fet lou Co, escoutom’en bouci
« Digo-me quallo bido mènès ?
« N’ès pas las dé touchour pôti
« Dé biourè touchour dins los pénos
« Té ! sé bos, déspendro dé tus
« D’estré pus hurous que digus. "

_- Qué disés, fèt lou Lout, et coussi fa pècayré ?
« M’obiooû dit qu’un Co bolio gayré,
« Mais l’azzè fiquo s’es bertat !
Fosen cinq-sos : ah ! m’obiooû plo troumpat !
« Disios ? - Disioy qués un paoure embécillé
 « Noun pas beleou ?- Si bé l’azzé mé quillè !
Que fas pey bos... Piètréchés, moun eflon,
« Son counta qué morés dé fon
« Lous tres quarts de l’onnado ! 
« Lou coytibié té tüoro, paouré biel,
« Sè qualquo brabo fusillado
« N’ou té bé coupa l’estuflel !
« Fay milliour ; ombé giou béni ol meoune oustal
« Oquis foras touchour boumbanço,
« Touchour y ooûras déqué emplina bien lo panço
« Dequé moncha plo coumo cal !
« Lou motis per endéchuna,
« De soupo’on brabo terrino .
« On d’un croustet que pot counta :
« O met chour, paourè, lo cousino
« Nol !... Ni may foués per un curé !
« L’y o dé qué s’en léca los pottos. 
« Ocos un flot de biooû, dé roustit, dé paté,
« Que sabi yeou ,.. per soupa dé rimotos,
« Touchour dé car sons ossès ! pey ol let ;
« Et dourmen plo touto lo net. - »
N’ochessi pas que lo mitat
Et serioy counten, so pensabo
Lou Lout ! Fousquet leou décidat,
Car l’ourdinary gl’y ogrodabo.
Olero (chomay plus s’es bis) Lou
Lout et lou Co s’en onèrou
Coum’un pores de biels omits.
Pel bras touches dous s’ottroperou,
Tout s’en onen, lou Co bontabo
So bido, sous chots, sous plosès
Et zo bontabo, Diou morsès !
Lou Lout. pécayrè, l’ogochabo,
En l’escouten de soun miliour,
A Lou Co, guel, porlabo touchour ;
Et l’un costo l’aoùtre morchabou.
Décha de l’oustal s*opprouchabou,
Quand en dintren din d’un droyol
Lou Lout lou m’ogacho pel col
Et bey moun Co, lo pel entèmènado.
Lou Lout o raromen uno bouno pensado :
 . « Qualqu’un to goffat, l’y. diguet ?
 - « 0 zoun ? - Pel col - Poh ! ocos men de caouso
 « De tens en tens, moun mestre l’y me paoûzo
<< Un coullier ! - Un coullier
Et moun Lout s’orrestet.
 -. « Un coullier o toun col ? - Bodaoû, ques oco may.
 - « Un coullier ! N’ay plo prou de touto to boumbanço .
 « T’en podes ona ounptè play
 « Pas de coullier, quond me dioùguès rompli lo panso !
 « Bay t’en tout soul ol teounè oustal. !
 « Pey bosses potiray sé cal
 « Mais seray libre et qué se fiquo !
 « En iffer tus omay to cliquo. ››
 Et toleou biret lou tolou.

Per yooû, trobi qu’obio rozou,
Trobi que se moustret plo saché
Dé boulé pas de l’esclobachè !
Lou Lout disio bien lo bertat :
Ço qué cal may oyma, ocos lo libertat !

MA TRABUCADA

Ce qu’il faut le plus aimer, c’est la liberté !
Voici la meilleure maîtresse .
C’en est une qui n’a jamais trompé.
A quoi sert la gloire, la richesse ?
À quoi sert d’avoir bon vin, bon lit,
Si on ne peux faire seulement un pas,
Si on ne peut tourner le dos
Lever le doigt, changer de mine
Sans qu’aucun serviteur du roi
Soi disant au nom de la loi
Nous vienne ici montrer son faciès
Ah que ça serait de bonne grâce
Avec un bon bout de baton
De leur caresser le "tourtou"
Que l’on se plairait alors !
Mais c’est assez ...Commencons notre histoire :

Au milieu d’un bois de Carlucet
Un Loup et un Chien se rencontrèrent
Le Chien gras et rond : le Loup pelé et sec
Tous les
deux se regardèrent
Le loup se croyait tout seul
Quand le chien en aurait assez ;
Car rien qu’à voir son échine
IL y avait de quoi frotter le bec
De quoi y penser jour et nuit ;

Le Chien faisait bonne cuisine ;
Jamais il ne pâtissait, donc il était gros et gras
Il avait la panse très gonflee
Il couchait sur un bon matelas,
Il ne supportait pas la rosée.
Ni plus la pluie ni le vent :
Meme s’il avait été au couvent
Il n’aurait pas eu meilleure vie...
Le loup lui fit pitié,
Avec son ventre tout pelé
Avec son poil mal "escorpido"
Faut dire que en ces temps là
Les loups pâtissaient très souvent ;
Car les chiens nuit et jour veillaient !
Et jamais ils ne s’en fatiguaient.
Notre Chien n’était pas comme ça ;
Il n’aurait pas eu un si bon rable
S’il n’avait pas souvent quitté l’étable !
Mais Il faut le dire Il avait un maître trop comme il faut ! Un maître comme il n’y en avait guère,
Un pauvre bodoounas peuchère
Qui était fou de ses petits chiens !
Que voulez vous faire ? Chacun ses gouts !
Notre Chien donc du Loup s’approcha
Et sortant un croûton de sa poche :
 " Tiens il lui fit, tu m’as bien l’air affamé.
Suce moi ça ;
Et quand tu l’aura dechiqueté
" Je te parlerai"
Le loup n’en fit qu’une bouchée
Tant IL avait la panse vide.
Maintenant fit le chien, écoute moi un petit peu
"Dis-moi qu’elle vie tu mènes ?
"Tu n’est pas fatigué de toujours patir
" De vivre toujours dans la peine
" Tiens ! Si tu veux
" ça dépendra de toi
" D’être plus heureux que personne"
Que dis-tu, fit le loup et comment faire peuchère ?
" On m’avait dit qu’un chien ne valait guère,
" Mais l’âne "fiquo" si c’est vrai !
" Faisons cinq sous :
Ah ! on m’avait bien trompé !
"Tu disai ?
Je disai que tu es un pauvre imbécile
 " Non pas peut-être
 Si oui que l’âne se cabre !
 Que fais-tu dans les bois... tu piétinne mon enfant,
 " Sans compter que tu meurt de faim
 " Les trois quarts de l’année !
 " Les chiens aussi te tueront pauvre vieux
 " Si quelque bonne fusillade
 " Ne te viens couper pas le sifflet !
 " Fais mieux ! Avec moi viens à ma maison
 " Là tu feras toujours bombance,
 " Toujours tu y auras de quoi bienremplir la panse
 " De quoi manger bien comme il faut
 " Le matin pour déjeuner
 "De la soupe avec une bonne terrine
 " Avec un croûton tu peux compter :
 " A midi, pauvre, la cuisine
 " Nol !!... Ni même fus-ce pour un curé !
 " Il y a de quoi s’en lécher les lèvres ,
 " C’est un morceau de bœuf, de rôti, de pâté,
 "Que sais-je moi ... pour souper de rimotos
 " Toujours de la viande sans os ! Puis au lit,
 " Et on dort bien toute la nuit."
 
N’en aurai-je que la moitié
Et je serai content se pensait le Loup !
Il fut vite décidé
Car l’ordinaire lui plaisait.
Alors (jamais plus cela è s’est vu) le Loup et le Chien s’en allèrent Comme une paire de vieux amis
Par le bras tous les deux s’attrapèrent
Tout en s’en allant le Chien vantait
Sa vie ses jeux ses plaisirs
Et IL la vantait ! Dieu merci !
Le loup peuchère le regardait,
En l’écoutant de son mieux,
Le chien lui parlait toujours ;
Et l’un contre l’autre ils montaient .
De la maison déjà ils s’approchaient
Quand en rentrant dans un sentier
Le loup me le regarde par le col
Et voit mon chien la peau entamée.
Le loup a rarement une bonne pensée :
 " Quelqu’un t’as mordu, lui dit-´
 " Où ça ?
 - Par le cou
 - C’est bien peu de choses
 " De tems en temps mon maître m’y pose un collier !

 " Un collier à ton cou
 - Boudiou qu’es que c’est plus.
 - " un collier !
 - j’en ai assez de toute ta bombance.
 " Tu peux aller ou IL te plait
 " Pas de collier même si on m’en devait remplir la panse !
 " Vas-t-en tout seul à ta maison !
 " Dans les bois je pâtirai s’il faur
 " Mais je serai libre et qué se fiquo !
 " En enfer toi et ta clique "
 Et aussitôt II tourna les talons

Pour moi je trouve qu’il avait raison,
Je trouve qu’il se montra très sage
De ne pas vouloir de l’esclavage !
Le loup disait bien la vérité :
Ce qu’il faut le plus aimer, c’est la liberté !

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