FETE DE SAINT-ROCH

, par Marie-Claude Gennero

Le lendemain du 15 août a lieu la fête de Saint-Roch (1), un saint très populaire en Quercy (2). Le prêtre dit la messe du jour aux intentions de ses paroissiens et, l’office terminé, vêtu du blanc surplis et de l’étole, armé du goupillon, il s’en va dans le bourg et les villages bénir les bestiaux.

Les bœufs de la grange, liés pour le labour ou le charroi, sont conduits pour cette bénédiction ; évidemment, ils regardent sans étonnement, de leurs yeux ronds, le prêtre qui les asperge.

La bénédiction de ce jour doit les mettre à l’abri de la contagion. Même les plus incrédules et les moins pratiquants conduisent au prêtre, sur la place de l’église ou celle du village, bœufs, vaches, chevaux, moutons, etc. Ils feront bénir une botte de foin et un morceau de pain, que l’on mêlera à la nourriture des animaux quand ils seront malades (3).

A Larroque-des-Arcs, il y a une chapelle de Saint-Roch, bâtie sur un rocher et dominant le bourg. Elle sert encore au culte. Le 16 août, une messe y est dite avant la bénédiction des bestiaux.

A Espère, on avait autrefois un culte tout particulier pour ce saint. Comme Saint-Roch était réputé pour préserver de la peste, on lui demandait dans cette localité la salubrité de l’air ; on le conjurait de détourner des habitants le fléau de toute épidémie. Une chapelle lui était même dédiée ; il en subsiste des ruines.
A Castelfranc, sur le bord du Lot, un peu en aval du bourg, il y a également une petite chapelle dédiée au même saint.

Le 16 août, à Saint-Céré, les gens conduisaient, il y a quelques années, sur la place du Gravier, les bœufs, chevaux, moutons et même les chiens que le curé de Sainte-Spérie venait bénir.

Après la messe de Saint-Roch, les femmes apportent au prêtre, pour une bénédiction, du pain, du sel et du grain destinés aux animaux.

A Lacave, on bénissait autrefois les animaux devant l’église et dans les villages où se rendait le curé. L’usage, depuis longtemps disparu, fut remplacé par la bénédiction de menues quantités de denrées destinées à la nourriture des animaux (foin, sel, maïs principalement).

Dans les localités avoisinant Lauzerte, Moissac, des familles ne font pas travailler les animaux (bœufs, chevaux) le jour de Saint-Roch. A la messe du matin, elles font bénir des tiges de maïs qui sont censées représenter la récolte elle-même destinée aux animaux de la ferme.

A Sainte-Sabine, canton de Saint-Antonin, dans le Rouergue quercynois, le dimanche avant le 15 août, au commencement de la grand-messe, un marguilier met aux enchères un cierge destiné à être offert le 16, jour de la fête du saint.

A voix basse, les fidèles font la mise à prix, en cette forme : « A un ciquièmé lou ciri de sén Roc ; à un cinquième (de blé) le cierge de Saint-Roch ». Ceux qui veulent acquérir ce cierge pour en faire l’offrande surenchérissent et le dernier offrant paye parfois jusqu’à quatre et six sacs de blé. Le jour de la fête, à l’offertoire de la messe solennelle, il s’avance au pied de l’autel ayant à la main le cierge allumé et le remet au célébrant. Il est le premier à baiser les reliques du saint.

Signalons en terminant une expression bien connue à propos de deux personnes qui ne se quittent pas : c’est Saint-Roch et son chien. On sait que ce saint, étant retiré dans le désert, le chien d’un nommé Gothard lui apportait chaque jour un morceau de pain pris sur la table de son maître. Ce chien est devenu célèbre comme compagnon de Saint-Roch.

Note 1 - Dans la première moitié du XIVe siècle, à une époque de peste pour l’Italie, un chemineau qui s’appelait Roch éloigna le fléau des malades en traçant sur eux le signe de la croix. Voir, sur ce saint, le beau livre de M. Georges Goyau, Figures franciscaines, vingt et une planches hors-texte, Henri Laurens, éditeur, 5, nie Tournon, Paris (p. 72).

Note 2 - Saint Roch est le patron des églises de l’Hôpital Saint-Jean, du Roc, de Thédirac, de nombreuses chapelles et confréries, dont la liste serait trop longue. Il y a des reliques de saint Roch à Bagnac.

Note 3Voir à titre de comparaison, une curieuse communication de M. l’abbé Urboni dans les mémoires de la Société des sciences naturelles et archéologiques de la Creuse, tome XXII, page VIII (procès-verbaux), sur une bénédiction d’herbes pour la Saint-Roch et son lien avec la bénédiction prévue au Rituel pour l’Assomption.